Un début de XXe siècle mouvementé
A Gignac
En 1903, les religieuses reçoivent l’ordre de fermer leur école.
Le 24 février 1906, on procède à l’inventaire des biens meubles et immeubles de l’Eglise de Gignac. Le curé proteste vigoureusement contre ce commencement de spoliation et assiste à l’inventaire avec le Conseil de Fabrique en témoin passif, refusant de donner le moindre renseignement. Le curé et les Fabriciens refusent de signer l’inventaire.
Le 23 décembre, "les valets de la mairie" (l’expression est du curé Laffarguette) conduits par l’adjoint au maire Auguste Clément portent au curé la notification de la mise sous séquestre des biens de l’église de Gignac. Le curé refuse de les recevoir.
Le 27 janvier 1907, le receveur de Souillac vient prendre possession des titres de rente de l’église de Gignac. Il prend le cahier de délibération de la Fabrique, le double des derniers comptes, le titre de propriété de la grange laissée à la Fabrique (actuellement transformée en maison d'habitation, derrière l'église), un titre de rente de 300 francs (legs), un de 200 francs (legs de Françoise Sourzac épouse Charrazac, Madrange).
Le 21 novembre, le curé est expulsé du presbytère qu’il refusait de quitter (huissier : Jules Vitrac, de Souillac). Le curé rend les clefs le lendemain.
Témoignages d’Urbain Jarnolles, de Vielfour
Le curé Lafarguette
J’ai gardé un bon souvenir du curé Lafarguette. Ceux qui savaient le catéchisme, il était pas méchant avec eux. Il était original. La politique ! Il avait dit en chaire : « Un simple conseiller municipal… » (il voulait parler de Clément qui avait été excommunié).
Les processions :
On allait à la croix du Touron, à la croix de la Mission, à Saint-Antoine, à l’ancien cimetière, à la croix du Chazal, à la croix de chez la Delbose.
Par dévotion, le grand-père Baladre allait à Roc Amadour à pied et pieds nus pour faire pénitence (avant 1914). Il était pas républicain !
Quand la mère de Négret s’est mariée, j’étais juste revenu du régiment, on a coupé un mai dans ça nôtre, un peuplier, on a été le planter, on a fait une pancarte et on a mis deux drapeaux. Teyssandier, ces drapeaux, ça lui plaisait pas ! Il aurait fallu mettre une croix ! Mais enfin, il a laissé faire, mais on a vu que… Il y avait Blancs et Rouges !
Témoignage d’Huguette Delmas, de La Sotte
Je me rappelle que la Supérieure de Cressensac, j’avais 8 ans, m’a dit un jour : « Qu’est-ce que vous venez dire, vous, vos parents sont des païens, il lisent La Dépêche ! »
Protestation élevée en 1909 par le Comité Radical Socialiste de Gignac,
à la suite de la condamnation à mort de Ferrer (créateur en Espagne des écoles laïques et publiques)
"Citoyens, j'aurais l'intention de vous présenter un ordre du jour pour protester contre l'inique condamnation de Ferrer qui vient d'être fusillé dans la forteresse de Montjuich…(suit un résumé en 3 pages de la vie de Ferrer). Voilà, chers camarades, de quoi est capable le gouvernement d'un pays lorsqu'il est enserré par les griffes des moines et des prêtres.
Je vous propose donc, Citoyens, de joindre nos protestations avec celles déjà émises, sur l'ordre du jour suivant :
"Le Comité Radical-Socialiste de Gignac (Lot) réuni en assemblée générale proteste avec sa plus grande énergie contre le crime abominable commis sur la personne du Grand Ferrer, l'Apôtre des idées républicaines, laïques et anticléricales.
Vive la République Sociale".
Le Comité Radical-Socialiste de Gignac ( 7 juin 1908)
Au premier rang, de gauche à droite : Lasfargues (instituteur), le 4ème : Arlie (maison Labrunie), le 5ème : Gary, le 6ème : Dufau du Masset, le 8ème : Cérou, l'avant-dernier, Pascal
Au 2ème rang , de gauche à droite : le 2ème : Delpy de Gignères, le 3ème : Magne fils, le 4ème : Delpy, le 7ème : Malard de la Bélonie, le 8ème : Magne père, le dernier : Etienne Delvert
Au 3ème rang, de gauche à droite : le second : Rogemond, le 6ème : Vergne du Masset, l'avant-dernier : Bastit de Falsemoyer
Au 4ème rang : de gauche à droite : le 3ème : Clément Auguste, le 4ème : Francès,
Au dernier rang, le 6ème : Teyssandier
A Saint-Bonnet
1904-1905 : L 'Affaire de Saint-Bonnet
Les nouvelles dispositions que proposait la troisième République sur le problème de l'enseignement allaient créer une situation trouble. Dès le début de la suppression d'établissements religieux les curés de Gignac et Saint-Bonnet vont réagir.
Le maire de Gignac, Jean Louis Bordes, transmet en août 1904 une pétition d'une centaine d'habitants de Saint-Bonnet. Cette pétition demande la suppression du traitement de l'abbé Vermande, de la paroisse de Saint-Bonnet, et son changement. Celui-ci est accusé d'avoir prononcé des paroles insultantes vis-à-vis de certaines personnes dans la commune et vis-à-vis du gouvernement et d'exercer de continuelles vexations sur ses paroissiens :
- "Les républicains veulent enlever aux religieux la liberté d'enseigner pour faire des crimes".
- "Les personnes qui ne donnent pas pour le denier de Saint-Pierre sont des voleurs".
- "Je suis par dessus un roi, un empereur, un président de la république et je ne crains ni maire, ni adjoint, ni conseillers municipaux, je ne crains personne."
- "Les personnes qui ne se confessent pas sont comme les chiens de mon pays".
- "Ceux qui se marient civilement et se font enterrer civilement sont comme les chiens de mon pays."
- "Le gouvernement d'aujourd'hui, c'est le règne de la canaille".
- "Quelque mal ou crime que vous voyez faire à un curé, laissez-le, le bon Dieu le punira, car on ne doit pas attaquer un prêtre. Du reste qui mange du curé en crève."
Une enquête menée par le curé de Souillac (à la demande de l'évêque) n'apporte aucun élément nouveau.
A la suite de cette pétition, le Conseil de Fabrique de Saint-Bonnet signe une lettre dénonçant les mensonges dont était accusé le curé et soutient celui-ci. Mais on ne relève que douze signatures. Ce qui est peu par rapport à la centaine recueillie par les adversaires du curé. Ceci montre bien l'antipathie générale qui règne envers le curé.
Au mois de mai I905, l'affaire rebondit, une nouvelle polémique s'engage entre le curé Vermande et ses adversaires. En effet on l'accuse de retenir trop longtemps au catéchisme les enfants et de désorganiser ainsi l'école de Saint-Bonnet.
Le curé se défend d'enfreindre la loi du 28 mars I882 et dit en chaire que "le petit contrôleur avait menti et que c'était un idiot". (Le petit contrôleur, c'était le maire).
Le 9 juin 1905, le Préfet du Lot demande au ministère de l'Instruction Publique et du Culte de suspendre le traitement du curé Vermande et de le déplacer.
L'église de Saint-Bonnet restait donc sans prêtre. Les fidèles venaient à Gignac pour les offices, mais pour les enterrements, pas de prêtre. Une petite fille de la famille Delbos du Mas Redon est décédée (famille aujourd'hui éteinte). Delbos, un voisin, leur dit :
"- On va quand même passer à l'église, on va faire nos prières à l'église, on fera un enterrement religieux sans prêtre, dans l'église."
Ce fut un scandale.
L'évêché qui avait fermé l'église n'a pas supporté cette situation. Saint-bonnet s'est retrouvé avec une église excommuniée. Au bout d'un an, l'évêque est monté pour bénir la pauvre église, il y installa un monsieur Vayssié, un prêtre qui est resté quelque temps, et ensuite ce fut le curé Delbos.
Le 6 janvier 1908, l’évêque de Cahors revient à Saint-Bonnet. L’église est rouverte au culte. Les enfants de la paroisse reçoivent le sacrement de confirmation.
22 février 1906 : Devis estimatif des biens appartenant à la Fabrique .
1906 : Concession aux curés de Gignac et Saint-Bonnet de logements, objets mobiliers et églises. Dans les archives municipales on peut consulter la lettre du curé Laffarguette et les modèles de contrat qu’il propose.