Plus de 40 calvaires
Ces petits monuments, parfois extrêmement modestes, constituent un patrimoine culturel précieux qu’il faut impérativement protéger. Depuis une vingtaine d'années on assiste à une prise de conscience de l’intérêt que représente ce petit patrimoine architectural : plusieurs calvaires ont été restaurés par l’association Lo Patrimòni, certains sont même fleuris. Mais la tâche est encore immense.
En préservant ces vestiges de notre passé, en les restaurant lorsqu’ils se délabrent, nous honorons nos ancêtres et nous maintenons en vie le lien qui unit notre passé au moment présent. Les générations futures nous en seront reconnaissantes.
L’abondance des calvaires répartis sur l’ensemble de notre commune traduit la vivacité du sentiment religieux de nos Anciens qui affirmaient ainsi leur foi dans des lieux publics.
On dénombre sur le territoire de la commune 40 calvaires (dont 14 portent une date) et deux socles de croix qui ont disparu. La croix datée la plus ancienne est située à la sortie du bourg, en direction du Moulin : 1738. Cette croix a été restaurée en 1820, puis remise en état en 2003. Précisons qu’une date inscrite sur le socle ne donne aucune indication sur la croix elle-même : souvent une croix en fonte ou en fer forgé a remplacé une croix plus ancienne en bois ou en pierre, et la date n’a pas été modifiée. Les croix actuelles datent pour la plupart des XVIIIème et XIXème siècle : il s’agit de restaurations ou d’installations de nouvelles croix au cours de Missions de rechristianisation.
Le plan cadastral de 1830 et les actes notariés font état de croix qui ont disparu, par exemple à la Daudinerie, près de la Borne des Trois Evêques (Croix de la Jouaille), au Pech des Ioules (Moulin), la Croix de la Vigne (parcelle E 1215) ou encore la croix du Touron (derrière la maison, face à la fontaine).
Signification des croix
Croix de carrefours
Les croix de carrefours sont les plus fréquentes. Elles sont un témoignage de pratiques anciennes, dites « païennes » et récupérées par l'Église Catholique. Les croisements de chemins étaient considérés par les Romains et les Celtes comme des lieux maléfiques. Aussi élevaient-ils en ces lieux des autels en l'honneur du dieu du commerce et des voyageurs, Mercure pour les Romains, Lug chez les Celtes.
Le culte de la croix se développe à partir du IVème siècle en remplacement de ces anciens autels.
Jusqu’à une période récente, les paroissiens se signaient en passant devant ces croix destinées à chasser démons et malheurs. C'est pour cette même raison que les chrétiens ont gravé sur les linteaux de leur propre maison des croix ou d’autres symboles religieux ou magiques.
Croix de villages
Situées sur les places des hameaux, les croix étaient destinées à protéger l’ensemble des habitants. Il s’agissait d’écarter les dangers et de conjurer le mauvais sort.
Dans la plupart des villages des paroisses de Gignac et Saint-Bonnet, le couderc était dominé par une grande croix protectrice : ainsi aux Genestes, à La Sotte, à Falsemoyer, aux Maisons Rouges, à Sireyjol, Gignères, La Blénie.
Les croix de processions
Lors des Rogations, chaque matin les lundi, mardi et mercredi qui précédaient le jeudi de l'Ascension, le curé de Gignac et les paroissiens allaient en procession à la croix du Chazal, à la croix située près de l’Arbre des Trois Evêques et à la croix qui est à la sortie du bourg sur la route de La Valette. Le socle était recouvert de tissus blancs, des fleurs ornaient le piédestal et des cierges étaient allumés. Les fidèles venaient en procession au pied de ces croix, priant Dieu de bien vouloir protéger les récoltes à venir de la grêle, du gel et de la sècheresse.
Cette tradition a pris fin en 1958. Cette pratique existait également dans certains hameaux de la paroisse de Gignac. Par exemple, à la Démançonnerie, lors des Rogations, les habitants des villages voisins, y compris Vielfour et Gignères, se retrouvaient devant le calvaire.
Les croix de Mission
Au XIXème siècle, lors de chaque Mission destinée à rechristianiser la paroisse, une croix était érigée.
Avant d'arriver au Vignal, la croix s'appelle toujours, en 2003, "Croix de la Mission" (1858). La Chapelle Sainte-Anne a été reconstruite lors de la Mission 1844. Une deuxième inscription rappelle la Mission de 1895.
Au carrefour du stade (route du Touron), une croix de bois a été dressée en 1953 pendant la Mission dirigée par le Père Tivier et le Père Rolland. Cette croix remplaçait une croix antérieure en mauvais état. Sur le plan cadastral de 1830, cette croix était mentionnée sous le nom « Croix de la mission ». La croix qui y a été installée ensuite (jusqu’en 2004) provenait de l'ancien cimetière supprimé en 1958. Elle est aujourd’hui installée sur un cimetière remontant à l’époque mérovingienne, derrière l’église.
Les croix de cimetière
La grande croix de Saint-Bonnet située près de l’église rappelle l'ancien cimetière supprimé en 1880. La croix de l'ancien cimetière de Gignac a été déplacée et installée dans les années 1970 sur le socle d'une croix de bois en mauvais état, route du Touron.
Les cimetières actuels ont chacun leur croix de pierre qui date de la translation des cimetières de Gignac et Saint-Bonnet : 1878-1881. Le déblaiement des anciens cimetières a eu lieu dix ans plus tard. Lors de l’agrandissement du cimetière de Gignac, il a été installé une deuxième croix face à la nouvelle porte.
Calvaires-reposoirs
Dans la paroisse de Saint-Bonnet il existait des reposoirs entre les villages les plus éloignés et l'église. Lors des enterrements, le brancard était déposé devant ces croix et on changeait de porteurs : telle était la raison d'être du calvaire de la Tounissade.
Croix commémorative
Une seule croix, semble-t-il, a été élevée à la suite d’un accident mortel (chute du bûcheron)
Inscriptions
La plupart de ces croix sont des croix parlantes qui portent des inscriptions diverses :
• dates,
• titulus : INRI (Les Maisons Rouges), initiales de quatre mots latins Iesus Nazarenus Rex Iudaeorum, c’est-à-dire Jésus de Nazareth, Roi des Juifs, que Pilate avait fait mettre sur la Croix de Jésus.
• inscriptions pieuses comme O CRUX SPES UNICA ou PATER NOSTER,
• noms comme Sourzat (La Sotte), ou initiales : I qP (Falsemoyer),
• souvenir d’une mission : Mission 1858 (Le Vignal)
• indulgences (Saint-Bonnet).
Décors ornementaux
Les motifs ornementaux sont très variés :
- ornements religieux : croix, ostensoir, calice, couronne d’épines, outils de la passion, ange, étoile à 6 branches (sceau de Salomon),
- motifs végétaux : vigne, rose, fleur de lys ou épi de blé,
- détails architecturaux : niches, cabochons ou bras perlés, par exemple.
A partir de 1840, les croix en fonte se multiplient et sont moins intéressantes parce qu’on retrouve souvent les mêmes motifs et elles sont fabriquées en grandes séries. Certaines proviennent de la fonderie Corneau Alfred à Charleville, d’autres sont l’œuvre de Burichon (1832-1891) connu comme fondeur de cloches à Clermont-Ferrand. Plates et ajourées, elles sont ornées de motifs variés. Les croix en cep de vigne, comme celle de Gignères, sont de section circulaire : les bras et le fût sont une imitation du cep de vigne chargé de feuilles et de raisins, symbole du sang du Christ. Il s’y ajoute parfois des épis de blé en référence au pain de la Cène.
Au milieu du XXème siècle, on a vu apparaître une croix en béton (La Bélonie).
Quelques exemples de croix liées à l'histoire locale
Croix de Falsemoyer (1771, hauteur 180 cm)
Extrémités des bras pommelées (sphères aplaties), croisillon et fût prismatiques. Ce calvaire porte également 3 signes non identifiés : Iqp
Ce calvaire a été déplacé dans les années 1950 à la suite d’un accident de camionnette : le boucher, Baptiste Labroue, a reculé violemment sur le calvaire et l’a renversé, cassant le bras gauche du croisillon et le bras supérieur de la croix qui est retombé sur le capot du moteur. A la suite de cet incident, il a été décidé de déplacer le calvaire après réparation.
Croix de la Tounissade
Pierre monolithe restaurée en 2008
Inscription INRI sur le bras supérieur
Ancienne croix de carrefour, située au lieu-dit Les Quatre Chemins (Plan cadastral de 1830), qui servait de reposoir : à cause de l’éloignement des villages, lors des enterrements, on changeait de porteurs ici.
Avec la cession aux particuliers de lacs et chemins vicinaux, à la fin du XXe siècle, certains chemins ont été vendus, si bien que cette croix n’est plus située à un carrefour.
Avant restauration
Après restauration
Calvaire de Maison Neuve (dans un bois) 1938 Fonte
Deux anges aux mains jointes, calice surmonté d’une croix et d’une rose, fleur de lys, Christ, ostensoir, épi de blé. Socle refait récemment.
Calvaire commémoratif élevé à la suite d’un accident : le menuisier-charpentier Amédée Laujol coupait des branches pour récupérer les feuilles pour ses bêtes. Il fait une chute et se tue. C’est en souvenir de cet accident mortel que sa famille a fait élever ce calvaire sur le lieu même de la mort du bûcheron. Amédée Laujol meurt le 27 août 1938, il avait 75 ans.
Récemment le vent, lors d’un violent orage, a abattu le chêne et détruit la croix.
Croix de la Forêt Basse (route du Touron)
Le plan cadastral de 1829-1830 porte le toponyme Croix de la Mission. Le 28 avril 2009, sous l'égide de l'association «Lo Patrimoni», le carrefour du Touron s'est vu doté d'une nouvelle croix en chêne, réalisée gracieusement par Louis Laval, ancien menuisier de Gignac. La première, mise en place lors d'une Mission du début du XIXe s, a été remplacée plusieurs fois, la dernière fois c’était en 1953 à l’occasion de la dernière Mission. Celle-ci fut remplacée à son tour, en 1959, par la croix de l'ancien cimetière situé dans le bourg et transformé en place publique en 1958. En 2004, lors de l'aménagement du pourtour de l'église, cette croix a réintégré l'ancien jardin du presbytère, et avait laissé le socle du Touron bien vide.
A droite, Louis Laval (décédé en 2017)
Croix en pierre du cimetière de Gignac (1880)
Inscription en latin "HODIE MIHI O CRAS TIBI", gravure de tête de mort avec ossements en X
Inscription latine qu’on peut traduire ainsi : « Aujourd’hui c’est mon tour, demain ce sera le tien »
Quel sens peut avoir le signe O ? Peut-être un cercle symbole d’éternité ?
Croix de Roche
en fer forgé sur dé monolithe à la sortie du bourg, route de La Lande (mentionnée dans le plan cadastral de 1830)
Avant restauration du socle
Elargissement de l'embranchement, déplacement de la croix et réfection du socle
Croix du Chazal (hauteur 140 cm)
Croix de pierre à cabochons portant deux inscriptions sur la face avant : O CRUX AVE. et MDCCCXX.
Croix de carrefour portant deux dates : à l’arrière du croisillon en calcaire gris non gélif, 1736, et sur le piédestal, 1820 (date d’une première restauration). L’agenouilloir faisait autrefois partie de la croix elle-même.
Sans doute avait-elle été cassée ? Le bras horizontal n’est pas symétrique, le cabochon droit a été sculpté après coup.
La croix était, à l’origine, beaucoup plus grande. Elle est mentionnée sur le plan cadastral de 1830.
Croix de Saint-Bonnet (près de l’église) Hauteur 4 m
Extrémités des bras perlées. Elle porte les inscriptions : O CRUX AVE.SPES UNICA ! (sur la face avant du socle), la date :1890 (à l’arrière), l’inscription 40 JOURS D'INDULGENCES (à droite) et les mots PATER.AVE (à gauche).
A côté de l’église, croix située sur l’ancien cimetière désaffecté en 1880 et déblayé de 1890 à 1895. Cette croix a été élevée par la Fabrique de Saint-Bonnet.
Traduction des inscriptions latines : « O Croix, salut ! Espoir unique ! » (face avant) et « Notre Père » (face gauche).
Croix du square de l’archiprêtré
Titulus : INRI. Croix de l'ancien cimetière de Gignac, qui était situé près de l’église (actuelle place). Cette croix avait été déplacée route du Touron après la destruction de l'ancien cimetière en 1959. En 2004, lors de l’aménagement de l’ancien jardin du presbytère, Georges Delpech a rapatrié cette croix et reconstitué un socle.
La pierre avant porte deux initiales CE et deux dessins gravés : une équerre et un pic de tailleur. Cette pierre appartenait à l’ancienne maison Delpy (maison Renaissance) démolie en 1959 (place de l’église). La pierre horizontale et le tronc pyramidal appartenaient bien à l’ancien socle.
Croix de Gignères (fonte) Croix cylindrique. Décoration : rameaux de vigne
Située sur la place, c’est en même temps une croix de carrefour. Croix installée à la demande d’une religieuse du couvent de Vaylats née à Gignières :
Sœur Henri de la Croix née Laujols (31 juillet 1874-1951). Profession le 26 septembre 1895.
Restaurée en 2002 à la suite d’un accident de voiture.
Teyssilhac : un calvaire restauré - le 07/04/2016 20:44 par lopatrimoni
Voilà une cinquantaine d'années, avec l'arrivée de machines agricoles imposantes, les chemins Gignacois étaient parfois trop étroits, d'où la nécessité de les élargir en écrasant les murs en pierre sèche et en supprimant, par exemple, des calvaires séculaires. Ainsi, dans le village de Teyssilhac, une croix de carrefour était devenue gênante. Elle a été démontée et remisée dans un "coin" jusqu'à aujourd'hui. En effet les frères Jean-Claude et Guy Pozweck viennent de reconstruire avec bonheur le calvaire, à quelques pas de l'emplacement primitif, en utilisant les mêmes pierres. Et le calvaire s'insère parfaitement dans son nouveau cadre, comme s'il avait toujours été là.