et pendant la Révolution ?

Création des communes

Le décret de l'Assemblée Nationale du 16 février 1790 transforme les paroisses en communes.
Les villages de Souzet et des Salles sont rattachés à la commune de Nadaillac. Le 26 avril 1791, les habitants de ces deux villages se réunissent et forment le souhait de leur rattachement au Corps municipal de Gignac (ils en étaient membres avant la Révolution).
La commune de Gignac et celle de Saint-Bonnet font partie du canton de Sarrazac et du district de Saint-Céré (jusqu’à l’Empire). Avant la Révolution, Gignac et Saint-Bonnet formaient 2 communautés de la subdivision de Souillac et de l’élection de Figeac. En vendémiaire de l’An IX (=1800) les nouvelles communes Gignac et Saint-Bonnet sont réunies en une seule commune nouvelle. La nouvelle commune Gignac-Saint-Bonnet est rattachée au canton de Souillac.

Dernier Consul de Gignac : Pierre Arliguie de la Blénie.
Dernier syndic de communauté : Léger Labroue.
Dernier collecteur des tailles et porte-rôle : Jean Petitpas de Leygonie.
Premier maire de Gignac : Dominique Cérou de Lageneste, ancien juge de la châtellenie
Dernier consul de Saint-Bonnet : François Sourzac
Députés de Gignac : Jean Baptiste Joseph Parry,, Sieur Guillaume Gay, Pierre Larnaudie.
Députés de Saint-Bonnet : Sieurs Jean Bordes du Masdelpeuch, Jean Vergne Champaignac de Lasotte.

                            

Cahier de doléances des habitants de Saint-Bonnet

Le cahier de doléances déposé en janvier 2019 à la mairie de Gignac fait inévitablement penser aux cahiers de doléances remplis à Gignac et à Saint-Bonnet en 1789. Le cahier de doléances de Gignac a disparu, mais celui de Saint-Bonnet a été retrouvé dans un placard muré du Palais de la Raymondie à Martel par l'abbé Lachièze-Rey, qui dessert actuellement les paroisses de Gignac et Saint-Bonnet. Le document retraçant les découvertes de l'abbé Lucien Lachièze-Rey Cahiers de doléances du Tiers-Etat de la Sénéchaussée de Martel pour les Etats Généraux de 1789 est disponible à la bibliothèque.

                  

Ce cahier, rédigé en français, donne des indications précieuses sur la situation géographique, économique et sociale de la communauté de Saint-Bonnet :

-    Le sol est ingrat, le territoire sec et aride, éloigné de deux grandes lieues des prairies et fourrages.
-    Il n’y a ni commerce ni industrie.
-    Les habitants se plaignent de ce que les chemins ne sont pas réparés, ils sont impraticables.
-    On met en avant le nombre de pauvres dans la communauté. On signale qu’il n’y a aucune ressource pour les faire vivre, pas même dans les ateliers de charité.
-    Les récoltes sont dévastées par des chasseurs puissants ou des braconniers à leur solde qui se disent en droit de ruiner tout le monde.
-    On réclame le droit et la liberté de faire du tabac.
-    Il n’y aurait aucun arbre utilisable pour la marine. Le siège des eaux et forêts de Brive exercerait une surveillance inutile.

Ce cahier contient également des doléances plus politiques :

-    On conseille à l’Etat de réduire le nombre de ses fonctionnaires qui seraient plus utiles aux travaux des champs.
-    On se plaint de l’incorporation du Quercy au Rouergue. On demande la séparation des deux provinces.
-    Les habitants de Saint-Bonnet, en particulier ceux de La Veyssière et de Falsemoyer, se plaignent des lenteurs et de la cherté de la justice.
-    On demande que le Tiers-Etat soit en nombre égal avec les deux autres ordres réunis. On souhaite un vote par tête.
-    On demande que les droits des habitants de la Vicomté de Turenne soient reconnus et maintenus. Ce cahier évoque à plusieurs reprises la Vicomté pourtant morte depuis 1738. Dans l’esprit des habitants de Saint-Bonnet, elle existait toujours en 1789.

Le troisième groupe de doléances concerne la fiscalité (articles 3 à 8) :

-    Les habitants sont assujettis aux rentes seigneuriales sans proportion avec le produit du sol.
-    On demande un rééquilibrage égal dans la Vicomté, eu égard à leurs produits réels.
-    On se plaint de la façon dont se fait la levée des deniers royaux. C’est une charge qui ne pèse que sur le paysan et qui le ruine.
-    On demande que les impôts et les droits de collecte soient supportés par tous les contribuables en fonction de leur fortune propre. On trouve ces impôts arbitraires et exposés aux caprices de certains. Ils sont contraires à la liberté individuelle.
-    On se plaint de la multiplicité des rôles.
-    On regrette que les rôles ne soient pas faits dans la communauté elle-même. On demande la transparence.
-    On réclame la suppression de certains impôts : franc fief, nouveaux acquêts, capitations, milices.
-    Sur le plan des abus, on se plaint des concussions, des impositions décernées par le seul caprice des receveurs, et à contre-temps.

Ce cahier a été rédigé le 8 mars 1789, après les Vêpres, sur la place publique, lors d’une assemblée réunissant tous les habitants assujettis aux impôts.

Relations tendues avec le seigneur de Tersac

Depuis plusieurs années, les tenanciers du domaine de Tersac refusent de payer cens et rentes à François de Castres, chevalier, seigneur de Tersac.
Le 6 janvier 1790, vers 10 heures, deux habitants de La Blénie vont au château de Tersac, exigent et obtiennent sous la menace un billet de 300 l. Ils précisent qu’il y a à Gignac cinq cents hommes rassemblés, prêts à marcher sur Tersac pour mettre tout à feu et à sang. Le même jour, dans l’après-midi, le seigneur de Tersac porte plainte devant notaire contre ces incendiaires qui, malheureusement, ont donné dans le voisinage, des marques formelles de désobéïssance à la loi et au Roy. François de Castres, seigneur de Tersac, précise qu’il a cédé sous la menace et la peur.
Pour éviter la démolition du château par les habitants, la municipalité ordonne, le 12 septembre 1792, par décret qu’il soit gardé par les officiers municipaux et par un détachement de la garde.
Le 18 avril 1793, le citoyen François de Castres  est déclaré déchu et suspect par le Conseil général, par 13 voix (sur 16 votants), à bulletin secret. Sa femme, ses trois filles et lui-même sont arrêtés. Ils seront remis en liberté le 21 avril 1793.
Les biens de Tersac sont mis sous séquestre, et c’est la commune qui gère le domaine.

                           

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En 1794 à Saint-Bonnet
Le registre des délibérations de la commune de Saint-Bonnet (1794) apporte un éclairage précis sur cette période.
Le calendrier révolutionnaire est entré en usage. Ainsi, on apprend que « le 25 ventôse an II le conseil général de la commune de Saint-Bonnet étant assemblé pour le quintidi (…) tiendra ses séances tous les décadis et quintidis conformément aux vœux de la Convention. »


Saint-Bonnet devient Seu-Bonnet
Le culte religieux est aboli et les saints sont bannis, aussi Saint-Bonnet change-t-il de nom le 25 ventôse An II et s'appelle Seu-Bonnet. L’église devient Temple de la Raison. Le Conseil Général et le Comité de surveillance ayant délibéré, ils ont tout unanimement convenu et arrêté (…) qu’attendu que le nom de Saint que la présente commune portait est un nom fanatique et proscrit, elle le change en celui de Seu Bonnet.
Dorénavant, il n’est plus question de Saint-Bonnet dans le registre de la commune, mais de Seu-Bonnet (sauf oubli du secrétaire de séance) écrit de différentes façons : Seu bonet, feu bonet ou encore Fait à Seubonnet le dit jour…  Au fil des ans on trouvera également dans les archives Sen Bonnet, Sen Bonet, Seubonnet. L’ancien toponyme réapparaîtra le 9 nivôse de l’An V (29 décembre 1796).


L’arbre de la Liberté
Aujourd’hui 3ème décadi du mois de ventôse, an II de la République, le conseil général de la commune étant assemblé pour faire lecture des décrets de la Convention et à tenir sa séance ordinaire, voulant satisfaire et remplir le décret de la Convention du 3 pluviôse dernier touchant l’arbre de la liberté, la dite commune à la conséquence d’après les mesures qu’elle avait prises, attendu que l’ancien arbre de la liberté tombait en vétusté, d’en planter un autre de plus fort et mieux conditionné, et c’est ce qu’elle a fait dans l’instant, et ledit nouveau arbre a été planté aux acclamations du peuple.


L’église débarrassée des objets du culte
Le 8ème jour germinal an  II, l’agent général déclare : « Vous savez que je me suis rendu au district de Seucérés  suivant l’ordre que j’en avais reçu de l’administration au 23 ventôse dernier. L’administration dudit Saint Céré m’a donné l’ordre de faire remettre toute l’argenterie et meuble d’église de notre commune à ladite administration dans les délais de la décade tout au plus. En conséquence je vous exhorte à obéir dans le plus (bref) délai audit ordre et de faire transporter les dits effets par mains sûres et d’en rapporter reçu à la commune. »
Sur quoi le Conseil Général ayant délibéré a unanimement convenu qu’il partira demain 9 germinal un exprès de ladite commune qui apportera et remettra à l’administration du district les objets suivants :
un calice avec sa patère, un ciboire avec sa couverture aussi d’argent, et un soleil, un petit ciboire, le tout d’argent présent avec le sac où tout est renfermé, 2 livres six onces.
Ledit sac a été achevé et rempli de corporaux purificatoires et autres petits linges d’église. Lequel sac sera cacheté de cire rouge, plus deux aubes, surplis, 2 nappes, 6 chasubles de différentes couleurs avec leurs suites, 2 manteaux pluvials dont un de noir et généralement tout ce qui s’est trouvé de meubles d’église.
En conséquence le Conseil général a nommé le citoyen Jacques Albiat, secrétaire du Comité de surveillance, et Pierre Vergne, aussi membre du Comité de surveillance de la présente commune, qui se chargent de remettre à l’administration du district de Seuserrés ladit argenterie, linge, ornements et autres effets d’église, et qu’ils partiront demain 9 germinal.

 

Autodafé
Quant aux livres, statues, images et autres simulacres d’église, le Conseil général ajourne à après-demain jour de décade pour livrer le tout aux flammes et détruire tous les signes de fanatisme qui se trouveraient encore sur les murs de ladite église et ailleurs.

Aujourd’hui 10ème germinal, tous les tableaux, images, statues et tous autres objets d’église ont été livrés aux flammes en présence du peuple, et les autres signes de fanatisme ont été détruits.

17 germinal
L’agent national a délibéré qu’il devait nommer 2 commissaires pour porter au district de Seucerrés 4 chandeliers de cuivre jaune, une croix de cuivre. Le conseil général nomme le citoyen Bordes, agent national, et Chambon, secrétaire.

20 germinal
Affiche de publication pour la démolition des cloches de l’église de la présente commune.

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Graduale cadurcense (1774) ayant échappé à l’autodafé du 10 germinal de l’An II

                   

Lectures publiques et fêtes patriotiques
Aujourd’hui première décade de messidor de l’an II de la République une et indivisible, le conseil général de la dite commune assemblé et tenant sa séance, il a été fait lecture des différents décrets arrivés en présence d’un grand nombre de citoyens et citoyennes de la présente commune. Finalement il a été fait lecture pour la troisième fois du rapport de Robespierre et du décret sur les rapports des idées religieuses et morales avec les principes républicains et sur les fêtes nationales, chaque décade que la lecture a été faite tous les citoyens et citoyennes de la commune se sont livrés à la jouer en chantant des hymnes nationaux et chansons d’allégresse.

Vicissitudes religieuses

Les troubles religieux de 1795-1796 s'accompagnent de la profanation d'arbres de la Liberté. L'Arbre de la Liberté était planté dans les bourgs, mais aussi dans les hameaux, comme à La Blénie. Les habitants de La Blénie avaient planté un arbre que Joseph Veges, métayer, a coupé le 11 mai 1796. Arrêté, inculpé, interrogé, il déclare que l'orage, au début de janvier (sic) a fait tomber la moitié de l'arbre, l'autre moitié menaçait de tomber, alors il l'a arraché, mais il offre de planter un autre arbre. Le 20 mai 1796, Veges est remis en liberté.

Le curé de Gignac, Pierre Blanchès, né à Montcabrier, refuse de prêter le serment à la République prescrit par les lois du 26 décembre 1790, 17 avril 1791 et 3 septembre 1792. Emprisonné d’abord à Cahors, il est ensuite transporté par bateau jusqu’à Bordeaux (en 1793 ou 1794), puis interné à la citadelle de Blaye réservée aux prêtres réfractaires.
En 1793 Pierre Lieurade prête serment ainsi que le curé de Saint-Bonnet, Jean Lafaurie. Jean Lafaurie, vicaire régent de Saint-Bonnet, avait remplacé son oncle le 1er juin 1786. Ces Lafaurie étaient de Mayrac.
Elie Barre, prêtre de Gignac, abdique en 1793 et se marie la même année.
L’église de Gignac et celle de Saint-Bonnet deviennent Temples de la Raison.

La cave du curé 
A La Sotte, le calvaire est démonté et caché. Il sera reconstitué après la Révolution et existe toujours. Huguette Delmas a découvert, lors de travaux de restauration, la cache de curés réfractaires :
J’ai une seconde cave qui  a été comblée, et il paraît que le souterrain de la Farinerie venait jusque chez moi. C’est un petit peu loin, ça paraît étonnant.
Quand nous avons fait arranger une pièce à l’autre extrémité de la maison, la moitié de la pièce était pavée avec des pavés en pierre. Les maçons sont venus, ces pierres branlaient un petit peu, et ça s’est effondré. Il y avait un dicton dans la maison que connaissait très bien la belle-mère de Mme Goillon ; quand les enfants n’étaient pas très sages, mon père aussi, les parents leur disaient : « Si tu n’es pas sage, on te mettra dans la cave du curé ! »

Jusque-là, on n’avait pas eu d’explication sur ce qu’était cette cave du curé. C’est quand ces pierres se sont effondrées qu’on a compris. Ça existe toujours, j’ai laissé une trappe, on descend dans une espèce de caveau où il y a une grande pierre comme une table ronde avec de petites pierres autour. Après, on a trouvé de vieux papiers et dans notre famille il y avait des prêtres sous la Révolution qui avaient été cachés, des prêtres réfractaires qui n’avaient pas voulu s’expatrier, qui étaient restés, qui s’étaient cachés. Un de mes anciens disait à un grand-père de madame Labarade de Laspaux : « Piérou, si tu dis quelque chose, je te couperai la langue ! » (l’arrière-grand-père de Léonie, belle-mère de madame Goillon, était le domestique privé de mon arrière-grand-père).
Mes ancêtres étaient officiers de la Vicomté de Turenne. Ma grand-mère descendait des Vergne et j’ai un parchemin en vieux français qui nommait les Vergne "Patriciens pour bons et loyaux services rendus à leur Seigneur et à leur Eglise".

Pour en savoir plus, voir les documents publiés par l'Association Multi-Médi@

"Histoire et patrimoine de Gignac-en-Quercy"


Date de création : 23/07/2020 12:54
Catégorie : Au fil des siècles -

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