Robert Chalvet
A la mémoire de ce jeune Gignacois tué au Laos dans les soubresauts qui ont suivi la fin de la deuxième mondiale et précédé la guerre d’Indochine. Son nom est inscrit sur le Monument aux Morts.
Chevalier de la Légion d'Honneur, détenteur de la Croix de guerre, officier parachutiste, membre de la mission "K 1" (Kay One) ayant atterri à Paksé (Sud Laos) le 11 octobre 1945.
Né à Gignac le 4 mars 1922, Robert Chalvet quitte Paris clandestinement le 18 mai 1941. Engagé volontaire au 1er régiment de tirailleurs algériens, il fait la campagne de Tunisie. Appartenant à la DGER (services secrets de renseignements), il bénéficie en 1942 d’une permission de 45 jours qu’il passe à Gignac, dans sa famille. Sous-lieutenant à la Mission de Liaison Française d’Extrême-Orient où la guerre se poursuit, il rejoint Calcutta (Inde) d’où il donne pour la dernière fois de ses nouvelles le 23 septembre 1945. Volontaire pour l’Indochine, il fait partie d’un commando chargé de recruter et former des « Chasseurs Laotiens », groupes armés qui avaient pour but de lutter contre les indépendantistes Viêt-Minhs ou Lao Issala ; ces derniers, avec la bénédiction des Chinois et Américains, voulant empêcher la réimplantation des Français au Laos.
En attente du départ pour le Laos : une partie du Commando K1 photographiée devant un baraquement à Calcutta (septembre 1945).
Robert Chalvet : debout, à droite, avant dernier
Le premier détachement, nom de code Kay One, décolle de Jessore le 10 octobre à 05h20 avec à son bord 20 commandos. L'appareil est le Dakota n°353 des Forces Françaises piloté par le sous-lieutenant MILAN. Après une escale à Mingaladon, près de Rangoon en Birmanie, puis à Bangkok, le Dakota atterrit à Paksé (Laos) le 11 octobre à 08h40. Outre le capitaine AYROLLES, ce groupe de combat est constitué du lieutenant HINGER, des sous-lieutenants MÉNARD, Robert CHALVET, LE NICARDOUR, de l'aspirant ANGEVIN, des sergents-chefs BERBLINGER et FÈVE (radio).
Robert Chalvet est parachuté le 1er décembre 1945 en compagnie de quatre collègues près de Tchépone (Laos) déjà occupé par l’ennemi. Un débordement par le nord-ouest de Tchépone (Xepon) est tenté par le groupe emmené par VAUCHERET, lequel tombe le 1er décembre, près de Ban Nabo, dans une embuscade qui coûte la vie à trois autres Français du groupe AYROLLES : les sous-lieutenants MÉNARD, CHALVET (touché à la tête) et le sergent-chef BERBLINGER, et fait deux blessés : le lieutenant HINGER et l'ordonnance du lieutenant COMTE. Tchepone et Ban Na Bo sont situés sur la route 9, entre la Thaïlande et le Vietnam.
Dernière photo de Robert Chalvet à Gignac, en 1942, devant la maison familiale,
en compagnie d’Ali Haffa, tirailleur algérien qui sera arrêté à la frontière espagnole et envoyé à Buchenwald en 1943.
Extrait de sa lettre d’adieu (23 septembre 1945) : "Puisque Dieu aura jugé qu’il devait me rappeler à lui, j’espère avoir la fin que je crois avoir méritée. J’aurai fait tout mon devoir. Je ne serai pas à plaindre. Vous tous qui restez, ne me pleurez plus. La vie vous appelle. Mes sœurs chéries, que maman et papa soient aidés dans cette si rude épreuve. Ce sera votre meilleure prière. Soyez forts, soyez fiers, soyez bons. Restez unis. Voilà qui sera français, et que vos larmes soient fructueuses."
La dépouille de Robert Chalvet est rapatriée en 1950 et inhumée à Gignac le 18 août 1950. L’enfant que j’étais alors n’a jamais oublié l’arrivée du cercueil installé devant la maison familiale et recouvert du drapeau tricolore, un cercueil très différent de ceux qu’il avait pu voir à Gignac jusqu’alors. Les instituteurs et les enfants de l’école de Gignac s’étaient joints au cortège qui avait accompagné Robert Chalvet jusqu’au cimetière de Gignac où les honneurs lui avaient été rendus en présence des autorités civiles et militaires. Voici un extrait de l’éloge prononcé par son commandant :
"Notre jeune camarade, qui avait si bien su se faire aimer de tous, est tombé en brave, à son poste, dans le Moyen-Laos. Nous nous souvenons avec émotion de son enthousiasme et de la jeunesse de ses yeux. Il nous laisse son exemple dont nous saurons nous montrer dignes."