La calligraphie au cœur de la Bibliothèque
LIRE EN FÊTE 2002
La Dépêche du Midi
Dans le cadre de la Fête du Livre, Behnam Keryo, universitaire, poète, musicien et spécialiste de la calligraphie des langues du Moyen Orient, a animé le samedi 2 novembre 2002 deux ateliers particulièrement intéressants dans l'enceinte de la Bibliothèque Communale. Lotois d'adoption, mais originaire de Chaldée, berceau de l'écriture, Behnam Keryo enseigne cet art dans toute la France et même à l'étranger. "Dans mes interventions je fais retrouver les premiers gestes de l'écriture", précise-t-il. En effet les participants ont dans un premier temps découvert l'écriture cunéiforme, ils ont écrit sur une tablette d'argile à l'aide d'un stylet en bois de buis. Puis ils ont appris le maniement du roseau et découvert que cet outil d'apparence rudimentaire fut jadis utilisé par les Anciens en guise de plume. Le roseau trempé dans des encriers semblables à ceux de nos ancêtres a permis à Salomé et à Mathieu, deux jeunes lecteurs de la bibliothèque, de réaliser des dessins et des figures calligraphiques du plus bel effet. "Cette technique d'écriture m'intéresse beaucoup, c'est beau, ça fait de jolis traits sur le papier", dit Salomé. "C'est une autre façon d'écrire. Je trouve que c'est agréable et beau à voir," ajoute Mathieu. Après avoir écrit quelques signes en araméen, puis en arabe, chaque participant est reparti en emportant son propre prénom, et ceux de sa famille, écrits en araméen ou en arabe calligraphié : c'était le cadeau offert par Behnam Keryo et la Bibliothèque de Gignac à chacun des 22 calligraphes en herbe.
Behnam Keryo est décédé le 7 novembre 2017
Né en Irak, à Mossoul, autrefois Ninive, une des plus anciennes villes de Mésopotamie, Behnam Keryo arrive en France à l'âge de 24 ans pour poursuivre ses études. Il obtient notamment le Doctorat en sciences de l'histoire des religions à la Sorbonne en 1985 et enseigne les civilisations anciennes, notamment à l'université de Bordeaux. Avec son épouse Tania, il était installé à Valprionde (Lot) depuis une vingtaine d'années. Remarquable calligraphe, c'était un expert en écriture cunéiforme sur argile dont il avait fait un art. Traducteur, il excellait dans plusieurs langues et maîtrisait particulièrement les langues anciennes, le babylonien et l'araméen, sa langue maternelle parlée par Jésus.
Ce musicien accompli chantait et jouait du piano, de la flûte et de la cithare. Avec la passion dont il faisait toujours preuve, il s'était lancé dans un projet d'envergure : traduire le Houdra, un bréviaire chaldéen millénaire de 2 200 pages retraçant la vie de Jésus et rédigé en araméen entre le deuxième et le sixième siècle après Jésus-Christ par les pères de l'Église chaldéenne, branche catholique de l'Église d'Orient. Il était profondément blessé par la situation dramatique de son pays de naissance, l'Irak, et les violences subies par son peuple. Il organisait une fois par mois des vêpres en araméen à la cathédrale de Cahors.
Cet érudit chaleureux, courtois, plein de joie et de savoir-vivre, forçait le respect.